Recherchez (dans les rues de la ville)

Friday, April 24, 2020

Profil

Le portrait est photographique,
Évoque en lui théophanie.
L’œil, une substance séraphique,
Pointant constante épiphanie.

Lèvres scellées mais éloquentes
En discours cois mais substantiels,
Éclats inertes, héliocanthes
D’une pensée confidentielle.

Qu’anime donc la porcelaine
Couleur vermeille de surface
Qui déborde le cadre en fasce
Et se meut de nulle dégaine?

Son épiderme diaphane
Révèle ce brasier placide,
Ce joyau posé en pyxide,
Que libère un songe hiérophane.

Sunday, April 12, 2020

Demenement


Désinvolture timide mais assumée,
Féconde d’humilité et de hardiesse,
Et des paroles d’une éloquence exaltée
Qui déploie les vers d’une immaculée caresse.

Un départ qui revêt des allures d’exil
Pour celui qui ne bouge, expatrié urbain,
Qui cultive le rêve en démiurge imbécile,
Et d’éloges heureux couvre les jours anciens.

Abreuve-moi d’un mot, le plus rare et précieux,
En un souffle couché pour des mois de chaleur,
Une impression un songe, un astre de tes cieux,
D’un soupçon de printemps, donne m’en la couleur.

Je chante l’oraison d’un temps providentiel
Où, à peine effleuré par le mal folâtrait
Mon esprit dans ses yeux, profondeurs irréelles,
Témoin de gestes dignes du plus doux attrait.

Sunday, March 1, 2020

La Bête


J’aperçus le fier animal tourner le coin de la rue, et ma mémoire évoqua sa voix de grande enfant :

« Oh! Un sien! »

C’est comme ça qu’elle appelait sa fidèle créature, une brave championne, dirai-je pour dénoter sa féminité canine d’une autre façon que par ce mot galvaudé avec lequel on insulte trop souvent les putains. Cette biche ne pouvait être câlinée : elle cherchait sans cesse à nous attraper la main de sa gueule, afin de nous montrer comment faire, mais voilà qu’elle se faisait dépasser par ses limitations motrices. Et le problème est le même pour nous humains, à l’exception que nos limites sont plutôt psychologiques, émotionnelles. Mais outre cela, la bête ressemblait en tout point à sa maîtresse : elle savait mettre de la vie, animer une maisonnée, une assemblée, un party. L'animale ne connaissait pas la haine. Elle possédait la candeur d’une fleur, la joie d’un filet d’eau sur les galets, tout son corps riait très fort dès que d’un regard, on l’appelait. Elle était disponible, elle se donnait entièrement, avec abnégation. Elle ne demandait en retour qu’un peu d’affection, pouvoir courir dans les bois, une fois de temps en temps, dormir sur son tapis, près du lit de sa maîtresse, les quatre fers en l’air, en poussant de petits cris au fil des rêves qu’elle traversait en une nuit.

Sa maîtresse désirait, elle, être spéciale, comme si elle ne l’avait pas été, qu’elle ne pouvait l’être que dans le regard de l’autre. Cette humilité est tout à son honneur, mais vient avec son lot de complication : trouble de l’image, problème de gestion de l’affection, celle qu’elle projette comme celle qu’elle reçoit. Oh! Chère Romane, si seulement tu savais! Tu ne fais pas qu’attirer les regards, ils finissent par te suivre volontairement. Tu remplis de désir les hommes que tu rencontres, et sûrement quelques femmes aussi. Tu es une beauté équivoque, polysémique, polygénique, multibranche, apocope, tu es une énumération de chances et d’éventualités, de veine et d’auspices, d’amour et de passion. De muse pour Modigliani à écrin de joie, d’Europe sauvage à rameau de sage, la Lune s’épanche sur la poitrine des maîtresses, les flancs courbés, in illo tempore, des mythes gratifiés aux cœurs fédérés. Et sur l’olympe, cette descendante du chien de Valinor nous observe et parcourt le terrain enneigé de nos rêves.

Wednesday, January 1, 2020

Découvertes musicales et bon coups mélomanes de 2019


Cette année fut faste pour les femmes en matière de production musicale. Sara Dufour, avec son album éponyme, nous présente des textes très personnels sur des musiques enjouées, avec quelques pointes de mélancolie juste aux bons endroits. « Chez Té Mille », « Baseball » et « Histoires » sont devenues des classiques pour moi. Laura Babin nous a offert Corps coquillage, introspectif et envoûtant. Coups de cœur : « Regarde » et « Là ». Poulin, quant à elle, a été une belle surprise. Je l’ai découverte complètement par hasard dans une prestation live à CISM. « Peu m’importe » et « Assez », de son album L’Or des fous sont de petits bijoux. Avec les deux pièces que Marie-Gold a sorties, « JACK » et « Pousse ta luck », son futur premier album en bonne et due forme s’annonce très prometteur.

Sexe étranger
, de Nüshu, un groupe composé d’une section rythmique toute féminine est ma dernière découverte de l’année, et non la moindre. Un rock aux accents punk, brut et excessif. Parmi les sorties de 2019, mentionnons Kiwanuka, de Michael Kiwanuka, un « smooth soul » très agréable que m’a fait découvrir l’ami Alex. Michel Rivard a sorti L’Origine de mes espèces, un album très personnel et très dur. Le sujet, le mariage de convenance de ses parents dû à sa naissance, est traité avec dignité et gravité. C’est un album qui s’apprivoise tranquillement, ce qui est rare à notre époque. Le dernier Pierre Lapointe, Pour déjouer l’ennui, est de loin supérieur à La Science du cœur, son succès de 2017 que j’avais pourtant trouvé peu reluisant. Adrian Belew a fait paraître Pop Sided, un album léger et festif, qui fait regretter encore plus qu’on l’ait chassé de King Crimson. Peter Hammill, quant à lui, a sorti Not Yet Not Now, un coffret live de 8 disques qui contient beaucoup de ses meilleures performances enregistrées en spectacle, pendant que son acolyte Hugh Banton a fait paraître un album de reprise de Bach, HB plays JSB on HB3, dont la version de la passacaille et fugue en do mineur (BWV582) est particulièrement jubilatoire.